lundi 15 août 2016

Psychiatrie nutritionnelle : votre cerveau sous alimentation

Si le Pr Marion Leboyer est une sorcière, alors Harvard c'est Poudlard!

C'est sur un groupe de discussion facebook que j'ai lu récemment que le Pr Leboyer (une des spécialistes françaises de l'autisme), se ferait traiter de "sorcière" par certains de ses "collègues" (des collègues psychiatres psychanalystes, peut-être? Des copains de la Milivudes?!). Et hier j'ai regardé un peu Harry Potter et la coupe de feu..., donc voilà, chacun ses références cinématographiques...

Le Pr Leboyer est très branchée neuroinflammation, immuno-psychiatrie, et il est possible, qu'en conséquence, elle aussi s'intéresse à la psychiatrie nutritionnelle, dont il est question dans cet article que je traduis ici, pour les français quiches en anglais: un article du site web "Harvard Health Publications", publié par la Harvard Medical School.
Par le Dr Eva Selhub, 16 novembre 2015:

Psychiatrie nutritionnelle: Votre cerveau sous alimentation 


Pensez-y. Votre cerveau est toujours allumé. Il gère vos pensées et vos mouvements, votre respiration et vos battements de cœur, vos sens, il travaille dur 24H/24, 7 jours/7, même lorsque vous dormez. Cela signifie que votre cerveau requière un approvisionnement en carburant constant. Ce « carburant » provient de la nourriture que vous ingérez, et ce que contient ce carburant fait toute la différence. Pour faire simple, ce que vous mangez affecte la structure et le fonctionnement de votre cerveau et, ultimement, votre humeur.
Comme une voiture de luxe, votre cerveau fonctionne au mieux lorsqu'on lui fournit du carburant de qualité « premium ». Manger une nourriture de haute qualité qui contient beaucoup de vitamines, de minéraux, d'anti-oxydants nourrit le cerveau et le protège du stress oxydatif – ces déchets (radicaux libres) produits lorsque le corps utilise de l'oxygène, et qui peuvent endommager les cellules.
Malheureusement, tout comme une voiture de luxe, votre cerveau peut être endommagé si vous ingérez quoi que ce soit d'autre que du carburant « premium ». Si des substances contenues dans du carburant bas de gamme (tels que celles contenues dans les aliments industriels et raffinés) atteignent le cerveau, il a peu de façon de s'en débarrasser. Les alimentations riches en sucres raffinés, par exemple, sont dommageables pour le cerveau. En plus d'être problématiques pour la régulation de l'insuline, elles favorisent l'inflammation et le stress oxydatif. De multiples études ont trouvé une corrélation entre un régime riche en sucres raffinés et un fonctionnement cérébral altéré – et même une aggravation des symptômes des troubles de l'humeur, comme la dépression.
C'est sensé. Si votre cerveau est privé d'une nutrition de haute qualité, ou si les radicaux libres ou des cellules pro-inflammatoires circulent dans le cerveau, contribuant à endommager les tissus cérébraux, il va y avoir des conséquences. Ce qui est intéressant, c'est que pendant de nombreuses années, le champ de la médecine n'a pas pleinement reconnu la connexion entre humeur et alimentation.
Aujourd'hui, heureusement, le champ bourgeonnant de la psychiatrie nutritionnelle découvre qu'il y a de nombreuses conséquences et corrélations entre, non seulement ce que vous mangez, comment vous vous sentez, et comment vous vous comportez, mais aussi le type de bactéries qui vivent dans vos intestins.

Comment la nourriture que vous mangez affecte la façon dont vous vous sentez

La sérotonine est un neurotransmetteur qui aide à réguler le sommeil et l'appétit, module votre humeur, et inhibe la douleur. Puisque environ 95% de votre sérotonine est produite dans votre système digestif, et que votre système digestif est tapissé de cent millions de cellules nerveuses - ou neurones, c'est logique que le fonctionnement de votre système digestif ne soit pas seulement responsable de la digestion de votre nourriture, mais guide vos émotions. Et qui plus est, le fonctionnement de ces neurones – et la production de neurotransmetteurs, comme la sérotonine, est hautement influencée par les milliards de « bonnes » bactéries qui constituent votre microbiome. Ces bactéries jouent un rôle essentiel dans votre santé. Elles protègent la paroi de vos intestins et forment une barrière solide contre les toxines et les « mauvaises » bactéries ; elles limitent l'inflammation, elles améliorent l'absorption des nutriments contenus dans votre alimentation, et elles actionnent des circuits neuronaux qui relient directement les intestins et le cerveau.
Des études ont montré que lorsque des gens prennent des probiotiques (des compléments contenant de bonnes bactéries), leur niveau d'anxiété, leur perception du stress, leur tournure d'esprit s'améliorent, comparé à des gens qui n'en ont pas pris. D'autres études ont comparé des régimes traditionnels, comme le régime méditerranéen et l'alimentation japonaise traditionnelle, à une alimentation occidentale typique ["moderne"] et ont montré que le risque de dépression est 25% à 35% inférieur chez ceux qui consomment une alimentation traditionnelle. Les scientifiques expliquent ces différences par la richesse de ces alimentations traditionnelles en légumes, fruits, céréales complètes, poisson, fruits de mer, et leur faible teneur en viande grasse et laitages. Elles sont aussi dépourvues d'aliments industriels et raffinés et en sucres, qui sont les bases du régime occidental. De plus, beaucoup de ces aliments non-industriels sont fermentés, et agissent donc en probiotiques naturels. La fermentation utilise des bactéries et des levures pour convertir les sucres en dioxyde de carbone, en alcool, en acide lactique. Elle est utilisée pour conserver les aliments et leur donner un goût et une texture agréable.
Cela peut vous sembler invraisemblable, mais la notion que les bonnes bactéries, non seulement influencent ce que vous digérez et ce que vous assimilez mais affectent le niveau d'inflammation dans tout votre corps, ainsi que votre humeur et votre niveau d'énergie, cette notion gagne en popularité parmi les chercheurs. Les résultats ont été assez extraordinaire jusque là.

Qu'est-ce que cela signifie pour vous ?

Commencez à prêter attention à comment vous vous sentez après avoir mangé différents aliments – pas seulement dans l'instant mais le lendemain. Essayez d'avoir une alimentation « propre » pendant 2 à 3 semaines – ce qui signifie supprimer tous les aliments industriels et le sucre. Ajoutez des aliments fermentés, comme le kimchi, le miso [non pasteurisé, NDLT], la choucroute, les pickles, ou le kombucha [en magasin bio! NDLT]. Vous pourriez aussi tenter une alimentation sans laitages – et certaines personnes se sentent même mieux quand leur alimentation est sans gluten. Voyez comment vous vous sentez. Ensuite, réintroduisez les aliments [transformés] un par un, et voyez comment vous vous sentez.
Quand mes patients passent à une alimentation « propre », ils ont du mal à croire à quel point ils se sentent mieux à la fois physiquement et émotionnellement, et à quel point ils se sentent plus mal quand ils réintroduisent les aliments connus pour favoriser l'inflammation [aliments industriels, sucre, gluten...]. Essayez !

Pour plus d'information sur ce sujet, voir « Nutritionnal medicine as mainstrem in psychiatry », Sarris J, et al. Lancet Psychiatry. 2015.

Le champ de la psychiatrie nutritionnelle est relativement récent, cependant il existe des données relatives à l'association entre la qualité de l'alimentation et la santé mentale dans différents pays, cultures et groupes d'âge – sur la dépression en particulier. Voici quelques liens vers des revues et meta-analyses :
http://ajcn.nutrition.org/content/99/1/181.long
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23720230
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4167107/Il existe maintenant 2 études suggérant qu'une amélioration de l'alimentation peut prévenir la dépression :
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3848350/
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4050338/
L'alimentation durant les premières années de la vie est aussi lié à la santé mentale des enfants :
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/24074470
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25524365
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23541912

De nombreuses données sur les animaux montrent que les modifications de l'alimentation affectent la plasticité cérébrale et il existe maintenant des données sur les humains qui suggèrent la même chose :
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4563885/
Finalement, une étude à venir sur le traitement de la dépression via une amélioration de l'alimentation, et dont les résultats devraient être publiés prochainement.
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3636120/
Autre lien sur le sujet : Healthy eating : A guide to the new nutrition http://www.health.harvard.edu/special-health-reports/healthy-eating-a-guide-to-the-new-nutrition?utm_source=HHPBlog&utm_medium=link&utm_content=related-text&utm_campaign=referral



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